La morale - Le devoir




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Couverture d'un vieux carnet de morale, date inconnue.

Nous disons bonnes les vertus d'un homme, non pas à cause des résultats qu'elles peuvent avoir pour lui, mais à cause des résultats qu'elles peuvent avoir pour nous et pour la société : dans l'éloge de la vertu on n'a jamais été bien « désintéressé », on n'a jamais été bien « altruiste » ! On aurait remarqué, sans cela, que les vertus (comme l'application, l'obéissance, la chasteté, la piété, la justice) sont généralement nuisibles à celui qui les possède, parce que ce sont des instincts qui règnent en lui trop violemment, trop avidement, et ne veulent à aucun prix se laisser contrebalancer raisonnablement par les autres. Quand on possède une vertu, une vraie vertu, une vertu complète (non une petite tendance à l'avoir), on est victime de cette vertu ! Et c'est précisément pourquoi le voisin en fait la louange ! On loue l'homme zélé bien que son zèle gâte sa vue, qu'il use la spontanéité et la fraîcheur de son esprit : on vante, on plaint le jeune homme qui s'est « tué à la tâche » parce qu'on pense : « Pour l'ensemble social, perdre la meilleure unité n'est encore qu'un petit sacrifice ! Il est fâcheux que ce sacrifice soit nécessaire ! Mais il serait bien plus fâcheux que l'individu pensât différemment, qu'il attachât plus d'importance à se conserver et à se développer qu'à travailler au service de tous ! » On ne plaint donc pas ce jeune homme à cause de lui-même, mais parce que sa mort a fait perdre à la société un instrument soumis, sans égards pour lui-même, bref un « brave homme », comme on dit.


Nietzsche, Le Gai savoir, 1882.


Problèmes essentiels

  1. Universalité de la morale
    Y'a-t-il une ou des morales ? L'histoire ou l'ethnologie, par exemple, ne nous enseignent-elles pas que les valeurs morales sont relatives à la culture et/ou à l'époque considérée ? Peut-on affirmer qu'il existe des valeurs ou une morale universelles ? Cela ne nous condamne-t-il pas irrémédiablement à adopter une attitude ethnocentriste ? y'a-t-il donc un sens à parler de la morale, au singulier ?
  2. Quel est le fondement de la morale ?
    Si on peut définir une morale comme un ensemble de règles qui définissent le bien et le mal ou qui prescrivent à la conduite humaine ce qu'elle doit être, au-delà de ce qu'elle est effectivement, la première question qui se pose est de savoir d'où elle émane ou ce qui la fonde : La morale énonce des devoirs, mais pourquoi m'obligent-ils ? D'où tirent-ils leur légitimité ?
  3. Par quel moyen peut-on la connaître ou peut-on connaître notre devoir ? La raison ou le sentiment ? En raisonnant ou en écoutant son cœur ou une forme d'instinct ?
  4. Agir moralement, est-ce appliquer de manière absolue des principes définis a priori ou agir, dans une situation donnée, de manière à obtenir le meilleur résultat possible ?
  5. La morale est-elle naturelle ou relève-t-elle entièrement de la culture, est-elle anti-nature ?
  6. Accomplir ses devoirs moraux est-ce subir des contraintes qui suppriment notre liberté, ou contraire est-ce faire l'expérience même de la plus haute liberté ?
  7. L'action morale doit-elle viser le bonheur ?

Textes et références utiles

Vocabulaire

Les termes en gras sont définis dans la partie Lexique.

Origine / Fondement - Morale déontologique / morale conséquentialiste - Contrainte / Obligation - Fin / Moyen - Personne / chose - Hédonisme- Eudémonisme - Moeurs -

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A voir

- Crimes et délits de Woody Allen (1990)
- 24 heures Chrono (série TV) Pour une réflexion sur les conflits moraux ou de devoirs et sur l'opposition entre morale déontologique et conséquentialiste.

A lire

- Dostoïevski, Crime et châtiment ou Les frères Karamazov

Exemples de sujets

Dernière mise à jour : 25/03/2018