Audrey, élève de TES, 2008 (copie de Bac Blanc)

Note obtenue

Appréciation globale

12 De réels efforts pour lire méthodiquement le texte. Compréhension globale correcte. Il aurait cependant fallu développer certaines remarques, montrer leur lien avec des points du cours qu'il aurait fallu expliciter davantage.
Texte :
Il est bon de redire que l'homme ne se forme jamais par l'expérience solitaire. Quand par métier il serait presque toujours seul et aux prises avec la nature inhumaine, toujours est-il qu'il n'a pu grandir seul et que ses premières expériences sont de l'homme et de l'ordre humain, dont il dépend d'abord directement ; l'enfant vit de ce qu'on lui donne, et son travail c'est d'obtenir, non de produire. Nous passons tous par cette expérience décisive, qui nous apprend en même temps la parole et la pensée. Nos premières idées sont des mots compris et répétés. L'enfant est comme séparé du spectacle de la nature, et ne commence jamais par s'en approcher tout seul ; on le lui montre et on le lui nomme. C'est donc à travers l'ordre humain qu'il connaît toute chose ; et c'est certainement de l'ordre humain qu'il prend l'idée de lui-même, car on le nomme, et on le désigne à lui-même, comme on lui désigne les autres.
ALAIN


Introduction

A-t-on besoin des autres pour devenir nous-mêmes ? A travers cette question, on se demande quel rôle joue autrui dans notre vie. Dans son texte, Alain répond à cette problématique à travers deux exemples. Ainsi le texte se compose de trois parties, la première explique le rôle du travail ("Il est bon de redire..., non de produire"), la deuxième montre la nature de la parole et de la pensée ("nous passons tous... répétés") et la troisième aboutit à la conclusion que l'homme se construit à travers autrui ("L'enfant est... désigne les autres").

Dés la première ligne Alain annonce le fait que l'homme ne s'est jamais formé tout seul ("redire"). Il exprime déjà sa thèse de manière très explicite, pour lui l'expérience solitaire d'un individu n'est jamais réellement solitaire puisqu'elle dépend d'autrui. Le mot "jamais" souligne réellement la dépendance des uns vis-à-vis des autres. En effet, chacun se construit à travers les autres. 

En gras : Idée pertinente et/ou bien formulée



[...] Passage non pertinent relativement au texte.

De plus, quand bien même l'homme se croit seul lorsqu'il travaille, il ne l'est pas car avant de se mettre à travailler, il a dû imiter l'action d'un autre et écouter les conseils qu'on avait à lui donner et les explications. C'est ainsi que par les termes "premières expériences", Alain a voulu montrer que lorsque l'enfant aura enfin compris certaines choses, celles-ci auront été initiées à travers un autre homme et par la force des choses. Puisque ses premières expériences proviennent d'un certain mimétisme et comme l'existence d'un homme dépend entièrement et directement des autres, l'enfant en question aura muri et grandi grâce à l'attention et à la prévention de certains. Cela signifie aussi que l'enfant doit faire des erreurs pour comprendre les raisons de celles-ci et ne plus les répéter. "Ce qui ne nous tue pas, nous rend plus forts", ce dicton est un peu exagéré mais il souligne bien l'importance des erreurs dans la vie, elles nous forgent et nous font mûrir. Le "travail" au sens philosophique signifie faire une activité réglée, méthodique en vue d'un aboutissement et c'est grâce à cette définition qu'Alain exprime [l'idée qu'un enfant travaille pour obtenir et non produire]. On peut donc dire que quand un enfant apprend ses leçons, il travaille pour avoir une bonne note mais aussi qu'un jardinier qui jardine, c'est par plaisir certes, mais c'est aussi pour avoir un joli potager et c'est aussi un travail. Il faut donc une certaine méthode pour étudier ou même jardiner, ce qui prouve qu'il a fallu reproduire l'action de quelqu'un et comprendre le mécanisme pour aboutir à une satisfaction personnelle.

Ensuite, lorsqu'Alain énonce les mots "expérience décisive", il veut dire que c'est un moment important dans la vie d'un enfant de pouvoir s'exprimer. Quand on pense quelque chose, il faut savoir l'exprimer et c'est comme ça qu'un enfant répète et comprend. Les premiers mots d'un enfant sont généralement issus des parents qui lui ont répété des centaines de fois "maman, papa, bébé, moi..." et lorsque l'enfant comprend ce que cela signifie et pour qui ils s'utilisent, alors il les répète et cela lui vient ensuite "naturellement". Cette idée énoncée par Alain rejoint bien le point de vue de Boileau, qui disait "ce qui se conçoit bien, s'énonce clairement et les mots pour le dire viennent aisément". En effet, l'exemple de l'enfant montre bien que c'est seulement lorsque l'enfant comprend que les mots lui viennent naturellement. Cependant, au moment où l'enfant dit "je" ou "moi", où il commence à se construire, ce n'est qu'à travers des mots entendus et répétés. C'est pour cela qu'Alain utilise "en même temps" car c'est lorsqu'on pense, qu'on parle et inversement.

Ce n'est pas tout à fait le sens du passage

Enfin, dans la phrase "l'enfant est comme séparé du spectacle de la nature, et ne commence jamais par s'en approcher tout seul", on voit bien que la capacité d'un enfant à être autonome ne se fait pas, il ne découvre jamais les bons et les mauvais côtés de la vie tout seul. En effet "le spectacle de la nature" c'est la vie tout simplement et tant que les parents considèrent que ce n'est pas le moment, ce n'est pas le moment. On le "coupe" du monde extérieur, il est comme dans une bulle. Par exemple, lorsqu'un enfant veut s'approcher d'un animal ou même d'une "gazinière", les parents l'en empêchent en lui expliquant que c'est dangereux, ainsi ils évitent que leur enfant se fasse mal (...)

1 L'expression "ordre humain" aurait dû être analysée.

2 Le stade de l'imitation, de l'identification contribue bien à construire la personnalité d'un individu (cf.cours Sujet)

Dans la dernière phrase du texte, qui est assez longue ce qui montre qu'elle sert de conclusion à l'idée principale du texte : l'homme se construit à travers les autres. Alain énonce que l'enfant se construit grâce à [l'ordre humain, c'est-à-dire à la manière dont chaque chose doit se faire]1. Il ne voit qu'à travers le regard des autres, [il ne se forge alors pas sa propre personnalité]2, son propre point de vue mais c'est ainsi que chacun évolue. De plus, à cet âge, le monde "nous" est inconnu, ce qui signifie que le rôle des autres est fondamental pour nous apprendre à comprendre. La dernière partie de la phrase "et c'est certainement de l'ordre humain... on lui désigne les autres" souligne bien le fait que ce sont les normes, les habitudes qui forment l'individu et en particulier l'enfant. En effet, avant même sa naissance il est déjà prédestiné avec le prénom, la couleur, les style vestimentaire, cela dépendant du sexe. Ce sont donc bien les autres, en l'occurence ses parents qui le forment à être comme ça et pas autrement. Grâce au prénom "on le nomme" et à travers l'apparence, "on le désigne à lui-même" comme on l'a fait pour les autres et ils contribuent à la formation de sa personnalité et sa vision des choses, du monde à cette période de sa vie qui pourrait jouer sur la vision des  choses qu'il aura plus tard.

Conclusion

Pour conclure, l'expression qui dit "l'expérience des uns ne sert pas pour l'expérience des autres" est réfutée dans ce texte puisque pour Alain, notre expérience individuelle se fait à travers une expérience collective. [On peut alors se demander si la vocation principale du langage est l'expression ou la représentation ?]